LES ENQUÊTES DU COMMISSAIRE THÉO

 
 
 


  
 
 
  MEURTRE À L’ÉGLISE st JOSEPH DES ÉPINETTES
 
Un dimanche matin, à six heures, Théo fut tiré du lit. Un appel du commissariat l’invitant à venir d’urgence, un crime venait d’être découvert dans une église.
Théo n’hésita pas une seconde. Il réveilla Christophe, le capitaine, ainsi que Sophie, la jeune lieutenante. Après tout, se dit-il, la police est un service public et fonctionne même le dimanche ! Et puis pas de raison d’être le seul à se lever de bonne heure un tel jour. Privé de sa matinée grasse, Théo aurait bien réveillé la France entière…
Ils se retrouvèrent tous les trois, une heure plus tard, au commissariat. Un agent de service donna les coordonnées au patron.
Le crime avait eu lieu à l’intérieur de l’église Saint-Joseph des Épinettes dans le 17e arrondissement. Les policiers ainsi qu’une brigade de la scientifique se rendirent sur place, rue Pouchet. Un crime dans une église ce n’était pas banal pensait le commissaire et le jour du Seigneur !
Sur place, des fonctionnaires de police montaient la garde et avaient bloqué l’accès au parvis de l’édifice.
  • Ce n’est pas beau à voir ! leur dit un brigadier.
Il n’avait pas tort !
En entrant dans la nef, les policiers découvrirent la scène. Au fur et à mesure qu’ils avançaient, l’horreur sautait aux yeux.
Attaché face avant sur l’autel, les pieds et les poignets immobilisés par des cordes accrochées elles-mêmes au bas de l’autel, l’habit sacerdotal retroussé vers le haut, l’homme était ligoté le bas du corps dénudé entièrement. Un pieu, manche de bois préalablement épointé, s’enfonçait profondément dans l’anus. Son sexe coupé gisait à terre.  Ils firent le tour. Le buste basculait vers le devant. La bouche bâillonnée par l’amict dont les cordons maintenaient le bâillon, le visage du prêtre arborait les marques d’une grande terreur et d’une violente souffrance.
Les policiers se taisaient devant la monstruosité. Le légiste s’approcha de Théo et lui dit :
  • Il est mort dans d’affreuses souffrances. Son calvaire a duré plusieurs heures jusqu’à ce que l’hémorragie  des deux blessures s’arrête par manque de sang.
Il est vrai qu’une véritable mare de sang entourait et maculait l’autel.
       -      On dirait un rituel de sacrifice avança Christophe.
Théo se taisait. Il penchait pour une vengeance déguisée en rituel. Une terrible vengeance. Qui pouvait en vouloir à ce point au prêtre jusqu’à le torturer d’une façon sadique. Une vengeance murement réfléchie vu le matériel utilisé : un épieu préparé, des liens, un couteau. Le prêtre s’était-il laissé faire ? Avait-il été menacé par une arme ou assommé ?
L’amict, ce rectangle de toile et ses cordons qui servaient de bâillon avaient comme fonction, dans le culte, d’arrêter les pensées dangereuses. Pour Théo le symbole utilisé paraissait évident et délibéré.
  • Hormis la violence due aux tortures, l’homme ne présente aucune autre blessure ou trace de coup. L’autopsie nous donnera plus de précision.
Le médecin légiste continuait l’inspection du corps, prenait des notes, Sophie des photos de la scène.
Théo se demanda si ce crime était l’œuvre d’une ou de plusieurs personnes. Pour maitriser un homme sans l’assommer il faut être nombreux. Visiblement le prêtre ne s’était pas défendu.
 
  • Il a été endormi par du chloroforme dit, soudain, le légiste. Autour des lèvres des nécroses et la peau rougie sont caractéristiques de ce produit à haute dose.
  • Qui vous a prévenu interrogea Sophie auprès du brigadier de police déjà sur place ?
  • Nous avons reçu un appel de la part d’une femme. C’est la dame là-bas dans la salle de prières. C’est elle qui ouvre l’église pour préparer l’office. Elle a aussi découvert un carreau cassé à la porte d’entrée de la cité des fleurs.
L’église avait la particularité de posséder deux entrées : l’une rue Pouchet avec un large escalier pour accéder à la nef, l’autre donnait sur la cité des fleurs. La cité des fleurs est une voie privée sans automobiles. Une association syndicale libre gère cette cité. La rue est ouverte aux passants à partir de 7 heures et jusqu’à 19 heures, sauf le dimanche ou la fermeture aux non-résidents est à 13 heures.
  • Le prêtre était âgé de 68 ans d’après l’évêché que nous avons contacté. Il était dans cette paroisse depuis moins de deux ans.
  • Bien Sophie. Essayez d’obtenir le maximum de renseignements sur cet homme.
 
La femme qui avait découvert le corps était une bénévole de la paroisse. Choquée, tremblante, un policier restait près d’elle et l’avait fait assoir dans une salle de prières au fond de la nef. Le policier tentait de la consoler. Un autre bénévole une main posée sur l’épaule essayait de la réconforter. Belle femme se dit Théo. Elle affichait la cinquantaine avec belle élégance. En s’approchant, il se dit que sa douleur paraissait profonde, trop peut-être pour une victime qui restait un étranger à moins que… Théo subodorât une relation plus forte entre le mort et ce témoin. Son expérience des humains l’incitait à voir une relation peu catholique ! Ou elle était bonne comédienne et jouait son rôle à merveille ou sa peine était immense. Était-elle la maîtresse du prêtre ? Auquel cas la dimension passionnelle du crime ne pouvait être écartée bien que la violence de celui-ci inversait cette idée. Une vengeance d’un homme jaloux du prêtre et de sa relation supposée avec cette femme ? Mais pourquoi cette violence ?
Ce n’était pas la première fois qu’un prêtre fautait. C’était même bien plus courant que le pensait tout un chacun. La chair a des faiblesses…
Quelqu’un aurait-il voulu mettre un terme à cette faiblesse ? Ce crime odieux était-il un avertissement ? Mais envers qui et par qui ?
  • Vous sentez-vous un peu mieux Madame s’enquit Théo ?
  • Oui ! répondit l’inconnue les larmes aux yeux.
Elle était gracieuse malgré son visage défait par la peine. Sous son corsage échancré, deux admirables seins attiraient le regard. Pas étonnant que le bénévole penchait dangereusement vers la poitrine. Les soubresauts de sa peine agissaient les deux globes et les mettaient en valeur. Le Jésus sur la croix, au-dessus d’eux, devait vivre un calvaire ! Elle portait une jupe courte qui laissait voir des cuisses galbées et parfaites.
Théo était un flic direct, sans fioriture. Il pensait que cette façon de procéder mettait  mal à l’aise les témoins, éventuels coupables, et pouvait déclencher des indications nécessaires au dénouement de l’enquête.
  • Vous étiez sa maîtresse ? demanda-t-il devant l’air stupéfait et réprobateur du bénévole.
Elle resta silencieuse un long moment, les yeux dans ceux du commissaire.
  • Oui ! répondit-elle d’une voix ferme, depuis plusieurs mois nous avions des relations sexuelles.
Le bénévole, à ces mots, enleva sa main de l’épaule de la femme. Il faisait une tête d’enterrement ce qui était de toute façon de circonstance. Il semblait tomber des nues devant cette révélation non conforme à l’évangile.
En guise de seins, Théo regardait ceux de la femme. Le prêtre avait eu bon goût pensa-t-il.
  • Ce n’est pas vous qui avez tué  le prêtre ?
  • Non-monsieur ce n’est pas moi !
Théo la croyait, après tout même les flics ont le droit de croire.
  • Où habitez-vous ?
  • À deux pas d’ici dans la rue Jonquière.
  • Vous vous voyez souvent ?
  • Une ou deux fois par semaine, le soir. Pierre, c’est son prénom, venait me rejoindre après avoir pris soin que personne ne le reconnaisse ou le suive.
  • Vous vivez seule ?
  • Oui !
Il se dit qu’il sera difficile d’obtenir un alibi pour la nuit du crime.
  • La nuit de l’assassinat de votre amant, du samedi au dimanche, où étiez-vous ?
  • Chez moi commissaire, toute seule !
Elle se remit à chialer.
Théo laissa la femme à ses tourments, à ses peines de cœur. Le deuxième bénévole lui avait disparu de la salle de prières peu enclin à consoler la femme à ses yeux coupable d’avoir fourvoyé un prêtre.
Christophe, le capitaine, venait vers lui.
  • Patron il y a un hic. La vitre cassée côté Cité des Fleurs n’a pas été détruite de l’extérieur, mais de l’intérieur de l’église. Les bris de vitre sont tous tombés à l’extérieur. Une personne a frappé le carreau de l’intérieur de l’église pour nous faire croire à une effraction venue de l’extérieur.
  • Merci capitaine.
  • Sophie, il faut savoir combien de personnes officient dans cette église et combien de bénévoles. Parmi ces gens-là, voir qui peut avoir accès à du chloroforme à haute dose. Récupérez les débris de la vitre peut-être que le casseur a laissé des empreintes.
L’assassin avait bien prémédité son acte. Il s’était enfermé dans la nef toute la nuit attendant le matin lorsque le prêtre se préparait pour l’office. Pourtant les cachettes paraissaient rares !
 
Théo savait que la plupart des crimes relevaient de l’entourage. Près de 60 % sont perpétués par des proches. Mais pour le commissaire ce crime odieux ne pouvait pas être le fait d’une femme. Théo ne le voulait pas ! Pourtant le sexe coupé le laissait croire. La régulière ou la maitresse pour empêcher une relation avec une autre pouvait se révéler très cruelle. Le prêtre voulait-il rompre ? Avait-il une autre maitresse ? La jalousie pouvait-elle expliquer le meurtre ?
Pourtant l’amict qui bâillonnait la victime indiquait autre chose : une punition du prêtre qui trahissait Dieu.
  • D’après l’évêché une dizaine de personnes fait partie de la paroisse : deux prêtres, un diacre et le reste étant des bénévoles très impliqués dans la bonne marche de l’église. Je les convoque tous dans la salle des prières pour cet après-midi, l’informa Sophie.
  • Je veux tout savoir sur ce prêtre, dit Théo : son parcours, sa formation, ses liens avec les gens, les lieux fréquentés…
 
Lors de la confrontation de l’après-midi, Théo remarqua que les huit personnes de l’équipe pastorale s’étaient ostensiblement écartées de la maitresse du prêtre. Charité chrétienne supposa le commissaire.
Le diacre prit la parole pour informer les policiers que, quelques jours avant, Pierre, la victime, avait eu une forte altercation avec le représentant de l’association Ouvrière Catholique dont le siège était situé dans la cité des fleurs à quelques pas.
Le deuxième prêtre, un curé, affirma que Pierre depuis plusieurs mois avait changé de comportement.
  • L’amour peut-être s’exclama Théo ?
Le prêtre devint rouge écarlate et scandalisé, répliqua :
  • Non, monsieur, cela concernait ses relations avec les hommes de notre paroisse. Il prenait ses distances comme s’il voyait la vie autrement.
  • L’un d’entre vous l’a assassiné et je le trouverai. L’amict ne peut être le fait que d’une personne connaissant parfaitement le rôle de ce vêtement sacerdotal. Quelqu’un a voulu lui faire payer sa trahison d’aujourd’hui, mais aussi de son passé.
 Théo menait le bal. Il provoquait, avançait ses pions.
  • Mais monsieur cria presque le prêtre vous oubliez le carreau cassé. Quelqu’un s’est introduit dans cette église. Nous nous possédons les clefs pour entrer !
  • Justement monsieur, le carreau a été fracturé de l’intérieur pour nous faire croire à votre version et j’attends le résultat du labo des empreintes trouvées sur les débris.
Théo affirmait une chose qu’il ignorait et observait les visages. Ceux-ci paraissaient pâles, estomaqués.
  • Commissaire s’interposa brusquement la maitresse de la victime dans un silence à couper au couteau : avant notre relation sexuelle Pierre ne cachait pas sa pédophilie.
Cette affirmation plomba l’auditoire. On entendait voler les mouches, même le Jésus, sur sa croix, semblait stupéfait.
  • Nous en avons longuement discuté repris la femme. Un soir, ici même, Pierre m’avoua ses penchants pour  les jeunes et les dérives que cela avait engendrées au séminaire lorsqu’il encadrait des groupes d’élèves. Il combattait cette déviance, souvent sans succès.
Théo resta sans réaction comme s’il venait de recevoir un coup. Un coup violent. Le passé tel une déchirure refaisait surface. Un passé qu’il avait effacé de sa mémoire oubliant que la mémoire garde les souvenirs enfouis et que ceux-ci rejaillissent au grand jour lors d’un déclic !
La juge qui venait de les rejoindre ainsi que ses collègues regardaient le commissaire. Sa pâleur, son silence les inquiétaient.
  • Vous allez bien, demanda la juge ?
Théo ne répondit pas et sortit de la pièce laissant ses adjoints continuer les interrogatoires.
Il avait besoin d’air.
Le passé qui venait de refaire surface après tant d’années lui faisait mal.
 
Le lendemain ils se rendirent, Théo, Sophie, Christophe et la juge auprès de la section de l’association ouvrière catholique.
  • Vous avez eu, une altercation avec le prêtre de l’église demanda Théo au responsable.
  • Exactement commissaire, nous nous sommes emportés concernant le refus de son église d’accepter le mariage pour tous. Toutes les églises, catholiques, juives, protestantes, musulmanes sont opposées à cette loi sous prétexte que l’homosexualité est une déviance. Pourtant ces religieux sont les plus mal placés pour parler de sexe !
  • Que s’est-il passé ensuite ?
  • J’ai claqué la porte au nez de ce vieux réac. De toute façon nous avons de grandes difficultés avec l’église officielle, mais de là à le tuer !
  • Où étiez-vous la nuit du meurtre ?
  • Avec ma femme et mes deux enfants, commissaire. Je suis un croyant, mais je ne suis pas prêtre. Je suis un travailleur de confession catholique qui ne croit pas en l’église officielle !
 
L’enquête piétinait. Théo le sentait bien. L’autopsie confirmait l’utilisation du chloroforme. Ce fut Sophie, qui apporta un début de solution. En parcourant le C.V. du deuxième prêtre, elle venait de découvrir que celui-ci avait suivi le séminaire à l’époque le prêtre tué encadrait celui-ci.
  • Cette école de formation religieuse se trouvait dans les Cévennes du côté de Ponteil dit-elle.
Ce fut comme une lame qui pénétra la chair. Théo perçut la blessure et vacilla un instant.
  • Vous allez bien commissaire, demanda Sophie ?
  • Oui, un malaise passager, continuez.
Devait-il en parler ? Auquel cas l’enquête lui serait retirée, telle était la procédure.
  • Le séminariste a été formé de 1962 à 1966 dans cet établissement.
Théo transpirait fort. Il était entré au séminaire qu’en 1964. Il n’était resté que la première année, le temps de la rupture avec Dieu lorsqu’un frère l’avait…
À quoi bon ressasser se dit-il, il ne se souvenait plus du nom du frère. Était-ce le prêtre assassiné et celui-ci avait-il continué à sévir ?
Une vengeance après tant d’années ?
  • Retournons à l’église puisque ce prêtre y est. Nous allons l’interroger.
Dans l’église, le prêtre priait face à l’autel devant une statue d’un Jésus en fer jaune. Sur un prie-Dieu, agenouillé et les mains jointes, l’homme récitait des prières. Quand il aperçut les policiers et la juge, il se leva, fit un signe de croix et vint vers eux serein.
  • Vous avez été au séminaire dans les Cévennes et l’un de vos enseignants était le prêtre assassiné ?
  • Oui commissaire. Nous nous sommes revus lorsque ce dernier a été nommé dans cette paroisse.
  • Avez-vous eu des problèmes avec ce prêtre lors du séminaire ?
  • De quels problèmes voulez-vous parler commissaire ?
Théo était embarrassé. Il ne savait plus très bien comment formuler la question sans éveiller les soupçons de ses adjoints et de la juge.
  • D’après l’amante, ce prêtre semblait attiré par les petits enfants.
  • Oui ! j’ai entendu des choses sur ce sujet. Mais personnellement je n’ai pas eu à me plaindre de lui. Je me souviens que le responsable de l’établissement l’avait vertement réprimandé un jour. Je crois me souvenir de l’année : 1964. Ce chef d’établissement, un curé, lui avait carrément cassé la gueule devant nous en disant qu’il n’avait pas intérêt à recommencer.
Théo se souvenait de ce curé. Un dur, ancien résistant, chef de maquis. L’homme, bien que prêtre à l’époque, faisait le coup de feu contre l’occupant. La violence des hommes de Dieu avait fait peur à l’adolescent qu’était Théo.
Rien ne laissait penser que le prêtre interrogé avait un lien avec le meurtre. Ils se retirent dans la salle de prières pour faire le point. Le prêtre lui retournait à ses prières.
 
  • J’ai peut-être quelque chose d’intéressant, affirma Sophie. Le diacre s’occupe d’un dispensaire de la Croix Rouge. Il peut donc avoir accès à du chloroforme.
  • Intéressant, allez chercher ce diacre, demanda la juge.
Lorsque le diacre arriva, Théo lui demanda son âge.
  • J’ai 42 ans, monsieur.
  • Quel est votre formation, vous n’avez pas été au séminaire.
  • Non ! je suis civil. J’exerce une fonction auprès du prêtre, mais sans en être un. Dans le civil je suis infirmier dans un hôpital et bénévole à la Croix rouge.
  • Vous pouvez vous procurer du chloroforme ?
  • Bien sûr, sans problème.
Les enquêteurs et la juge restaient stupéfaits devant l’attitude du diacre. Celui-ci, sans arrière-pensée, les informait tranquillement qu’il pouvait se procurer du chloroforme ! Ou il était candide ou il jouait bien la comédie. Théo ne le croyait pas coupable. Trop jeune par rapport au prêtre pour une vengeance.
  •  L’homme reprit : nous en avons, mais nous  l’utilisons de moins en moins, car dans notre dispensaire nous ne pratiquons plus d’interventions chirurgicales. Désormais seuls les hôpitaux ou cliniques interviennent. Quelquefois des particuliers nous en demandent. C’est rare que nous en donnions, car nous savons que certains se droguent avec… dernièrement j’ai remis un flacon à la bénévole qui était l’amante du prêtre assassiné. C’était pour son frère il en avait besoin pour son travail.
  • Comment ! hurla presque Théo. Parlez non de Dieu ! Cette femme a un frère !
  • Ne blasphémez pas commissaire, vous êtes dans la maison de Dieu ! répondit calmement le diacre qui continua :
  •  le frère de cette dame est menuisier d’après ce qu’elle m’a dit. Il avait besoin de cette substance pour coller du plexiglas sur des objets de sa fabrication. Je lui ai donné un flacon.
  • Bordel de merde explosa Théo, allez me chercher cette dame illico, Sophie.
 
Lorsque la femme apparue, encadrée par Sophie et un autre policier, elle ne pleurait plus. Son visage était souriant. Elle était ravissante.
  • Alors commissaire vous avez fini votre enquête, dit-elle ironiquement.
  • Vous vous êtes foutu de moi depuis le début !
  • Tout à fait commissaire et j’ai pris grand plaisir.
  • Où est votre frère, explosa Théo.
  • À l’heure qu’il est, il est décédé.
  • Quoi !
  • Suicidé plus exactement. Sa vengeance exercée, il a mis fin à ses jours comme prévu. Quarante ans de souffrance, à ruminer, à végéter de psy en hôpital pour soigner son angoisse. Vous ne pouvez comprendre son calvaire, monsieur le policier. Mon frère a été violé par ce prêtre lorsqu’il effectuait sa première année de séminaire. Depuis ce fut la descente aux enfers, un chemin de croix permanent. Alors lorsqu’un jour ici même il a reconnu son violeur l’idée de vengeance l’a hanté nuit et jour. J’ai aidé mon frère et j’en suis fier. Nous avons ensemble concocté un plan machiavélique. J’ai séduit cette ordure jusqu'à sa confession. Il a tout avoué. Pour me sauter il aurait vendu sa mère ! je lui ai promis mon corps pour bientôt. Le monstre a violé tant de corps qu’il ne méritait que la mort. Je n’ai eu aucun mal pour obtenir l’anesthésique auprès du diacre. L’ouverture de mon corsage à suffit ! j’aurai pu demander à cet imbécile de tuer le prêtre, vu la grosseur de la bosse dans son pantalon, il était à ma botte. Mais nous avons préféré, mon frère et moi, nous en occuper. Ce prêtre est mort sans pouvoir satisfaire ses besoins. Je ne lui ai pas offert mon corps.
  • Comment avez-vous procédé ?
  • Dimanche matin nous sommes venus de bonne heure. J’ai présenté mon frère à Pierre qui ne l’a pas reconnu. Tandis que j’aguichai le prêtre, mon frère avec un tissu imbibé de chloroforme est passé derrière lui et l’a endormi. Ensuite nous l’avons préparé pour la sanction. Nous avons attendu son réveil pour qu’il soit bien conscient et mon frère l’a puni !
  • Où est votre frère ?
  • Dans son atelier de menuiserie à Asnières. Je vais vous donner l’adresse. Il n’a jamais pu être prêtre. Après son viol l’église a tout fait pour éviter le scandale. C’est lui qui est parti et bon nombre d’élèves ayant subi, du même enseignant, les mêmes outrages, aussi.
  • À l’époque il y a eu enquête ? Théo posait la question tout en connaissant la réponse.
  • Mon pauvre commissaire ! À l’époque l’église était intouchable. Les gendarmes ont clos rapidement l’affaire. La justice a émis un non-lieu, faute de preuves.
  • Pour qu’elle raison le carreau cassé ?
  • Nous voulions faire croire à la police que le deuxième prêtre était le coupable. Nous savions que les policiers comprendraient vite que le carreau cassé l’avait été de l’intérieur de l’église.
  • C’est ignoble de vouloir faire accuser quelqu’un d’autre ?
  • Toute cette engeance se protège les uns les autres. Quant à la justice, elle protège les violeurs que la victime soit homme ou femme.
  • Mais pourquoi tant de violence ?
  • Il a péri par où il a fauté !
Théo était abasourdi. Il comprenait sans accepter. Lui-même avait mûri sa haine longtemps avait de la ranger au fin fond de sa mémoire.
Sophie le tira de ses souvenirs :
  • Nous venons de recevoir une information de nos collègues d’Asnières qui se sont rendus sur place après notre demande : le frère de la dame s’est pendu dans son atelier. Il a laissé une lettre comme quoi il s’accuse du meurtre du prêtre avec force détails. Dans cette lettre il dit qu’il a obligé sa sœur à l’aider.
  • Je vous mets en état d’arrestation pour complicité de meurtre, informa la juge.
  • Tant mieux répondit la femme. Le procès permettra de mettre en lumière la médiocrité des hommes d’Église et la complicité de la justice. Cela sauvera peut-être d’autres enfants.
La femme, menottée, fut emmenée. Théo laissa ses adjoints faire le rapport. Il descendit la rue Jonquière pour gagner l’avenue de Clichy, direction le premier rad ouvert. Théo avait besoin d’oublier à nouveau !
 
 
 
 



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